Afrique : positions dissonantes des bailleurs de fonds


La période de crise sanitaire et économique secoue l'économie des pays africains, mais a également provoqué des échos différents dans la réactions des bailleurs de fonds sur leurs actions en Afrique. Si la Banque Mondiale soupçonne le détournement des aides dans une vingtaine de pays, mais continue à soutenir le continent, tout comme la Banque Africaine de Développement (BAD). De son côté, l'Union Européenne (UE), tout en continuant à financer des projets africains, a blacklisté quelques uns des pays économiquement performants comme l'île Maurice, le Ghana ou l'Ouganda, qu'elle accuse de blanchiment. La Chine a, quant à elle, allégé les dettes des pays africains. Retour sur une dissonance planétaire.





La double peine infligée par l'UE





En pleine crise sanitaire et économique en Afrique, l'EU a établi une blacklist de pays d'Afrique soupçonné de blanchiment. Il s'agit de cinq pays présentant pourtant une croissance économique soutenue : le Botswana, le Ghana, l'île Maurice, l'Ouganda et le Zimbabwe. Ces pays sont désormais inscrits comme "à risque" en matière de blanchiment d'argent. Cette action va compliquer l'accès de ces pays aux capitaux internationaux, les banques et autres institutions financières européennes. L'UE a déclaré qu'elle est tenue de contrôler de plus près ses opérations, et celles de ses partenaires financiers, dans ces pays. Les pays indiqués devront ainsi se tourner vers d'autres pays qui n'imposent pas ces contraintes de "compliance" supplémentaires.





Ursula von der Leyen, présidente de la Commission Européenne




Il faut savoir que le volume de transactions opéré par ces pays transitent en majorité par le circuit des diasporas à travers le monde. Ce volume à l'échelle planétaire est estimé à 550 milliards de dollars dont une grande majorité échappe aux contrôles institutionnels. Sauf que plusieurs pays africains déplorent cette sanction européenne qui survient en pleine crise. Le Zimbabwe a annoncé que son économie va régresser de 15% à 20% cette année, avec une crise sociale qui pointe déjà son nez. Le Ghana, plus performant, a également affiché un recul de sa croissance, passée de 4% à 2%.





Cette décision de l'UE semble illustrer la discordance au sein de l'Europe des 27 sur la posture à adopter pour faire face à la crise sur le Vieux Continent et les "pays amis". La crise du coronavirus a en effet révélé une discorde européenne profonde pour gérer les fonds vers le social ou l'économie, selon l'orientation de chaque pays. Cette discordance a par la suite touché les institutions financières internationales en pleine crise sanitaire et économique.





Appel à la solidarité envers l'Afrique par la Banque Mondiale





Mari Elka Pangestu, directeur général de la Banque Mondiale chargée des politiques de développement et des partenariats




Face à cette situation, la Banque mondiale recommande la solidarité avec les pays en développement. L'ancienne ministre indonésienne Mari Elka Pangestu, directeur général de la Banque mondiale chargée des politiques de développement et des partenariats a déclaré : "Le pire est à venir, car seuls les pays développés conditionnant l'économie mondiale seront les mieux placés pour faire face efficacement à la crise et se relever plus rapidement". L'Afrique est le continent le plus exposé du fait de sa part dominante de population active informelle et économiquement fragile. Le Fonds Monétaire International (FMI) prévoit une récession d'au moins 3,2% pour l'Afrique subsaharienne.





Akinwumi Adesina, président de la BAD




La BAD elle aussi veille sur la situation de chaque pays du continent et agit solidairement avec la Banque Mondiale afin de sauver les économies les plus exposées. Mais la BAD est également sous pression avec l'enquête indépendante menée par Mary Robinson, ancien président de l'Irlande, sur Akinwumi Adesina, président de la BAD. On parle également de lutte interne entre les actionnaires de cette institution pour son futur contrôle.





La Chine allège les dettes de l'Afrique





Le président Xi Jinping avec des homologues africains dont les dettes seront allégées




La Chine, en grande pourvoyeuse de fonds pour l'Afrique, allège les dettes du continent estimée à 145 milliards de dollars. Elle détient plus de 40% du volume total de la dette africaine depuis 2019, avant la crise du coronavirus. Le président Xi Jinping a déclaré récemment : "Pour les pays africains, les plus touchés par le coronavirus et qui subissent de fortes pressions financières, la Chine travaillera avec la communauté mondiale pour leur apporter un soutien accru, par exemple en prolongeant la période de suspension de la dette afin de les aider à surmonter les difficultés actuelles. Nous encourageons les institutions financières chinoises à répondre à l'initiative de suspension du service de la dette (DSSI) du G20 et à tenir des consultations amicales avec les pays africains, selon les principes du marché afin d'élaborer des arrangements pour les prêts commerciaux avec des garanties souveraines". Sur les 145 milliards de dollars dus à la Chine, l'Afrique devait rembourser 8 milliards de dollars en 2020. Ainsi, cette période de remboursement sera ajournée par la Chine pour soutenir le continent.


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