Journal de l'Economie | texte de Tsirisoa Rakotondravoavy | Nouvelle position de la Chine, par Thibault Minot, associé chez Dezan Shira Associates
TAORMINA- 03/06/2017 - Le dernier sommet du G7 à Taormina, en Sicile, a mis en lumière les nouveaux rapports entre Etats, entre dirigeants et entre de nouvelles forces d'influence naissantes. Au sujet particulier du climat, notamment sur l'Accord de Paris, les choses ont été dites. D'un coté, les pays ayant signé l'Accord de Paris, au nombre de 195, dont 147 avec les Etats-Unis qui ont déposé leurs différents instruments de ratification. De l'autre coté, ceux qui ne l'ont pas ratifié : les Pays-Bas, la République tchèque, la Roumanie, la Russie et la Turquie. Le Nicaragua et la Syrie ne l'ont tout simplement pas signé, et les Etats-Unis viennent de se joindre à eux, après l'avoir ratifié avec la Chine en septembre 2016 sous l'administration Obama. Son truculent successeur a tenu sa promesse en retirant sa grande Amérique de cet accord. Sauf que l'Amérique a montré les premiers signes de fissures profondes six mois après l'élection de Donald Trump. Au nom de la guerre économique, et de la guerre tout court, que ce dernier veut mener sur tous les fronts, son administration a signé avec l'Arabie Saoudite un contrat d'armement de 110 milliards de dollars, et pactisé avec l'ennemi juré de ce dernier, l'Israël, sur une nouvelle feuille de route pour la paix dans cette région sensible du globe. En outre, Donald Trump a exigé des partenaires de l'OTAN lors de son discours plus d'engagements financiers lors de la réunion du G7 en Sicile, tout en écartant comme un malpropre le Premier ministre du Montenegro lors de la photo officielle. Il a félicité tout le monde sur l'inauguration du tout nouveau siège de l'OTAN qui a pourtant coûté 1 milliard de dollars. Il a juste oublié de préciser que le G7 ne constitue "que" 40% du PIB mondial et le climat va peser de plus en plus sur cet indice planétaire.
Le reste du monde et le reste de l'Amérique ne voient pas les choses de la même manière. Fait inhabituel, ils ont livré leurs réactions et tout l'échiquier de la géopolitique mondiale jusqu'en Orient a tremblé. L'air de rien, à chaud.
Réactions
Emmanuel Macron : "Make our planet great again... Donald Trump a commis une faute pour l'avenir de notre planète. Aucun plan B n'est possible car il n'y a pas de planète B. La France ne négociera pas d'accord moins ambitieux".
Barack Obama : "J’estime que les États-Unis devraient se trouver à l’avant-garde. Mais même en l’absence de leadership américain, même si cette administration se joint à une petite poignée de pays qui rejettent l’avenir, je suis certain que nos États, villes et entreprises seront à la hauteur et en feront encore plus pour protéger notre planète pour les générations futures".
Theresa May : "L'Accord de Paris sur le climat protège la prospérité et la sécurité des générations futures".
Angela Merkel et sept membres sociaux-démocrates du gouvernement allemand : "Le retrait des Etats-Unis va nuire au monde entier".
Michael Bloomberg, ex-maire de New-York et président de la Bloomberg Philanthropies, a rencontré Emmanuel Macron au lendemain de la décision : "Les Etats-Unis rempliront les engagements lors de l'Accord de Paris. Nous ne permettrons pas à Washington de se mettre sur notre chemin, ma fondation Bloomberg Philanthropies aidera à coordonner les efforts américains et nous soumettrons une contribution nationale comme tous les autres pays l’ont fait".
Nicolas Hulot : "Il y a peut-être quelque chose de positif qui sort de cette décision. Je pense qu’il y a un axe autour de la solidarité universelle qui va se créer. Peut-être un axe inattendu entre l’Europe, la Chine, l’Inde y compris aux Etats-Unis".
Jeff Immelt, patron de General Electric : "Je suis déçu. Le changement climatique est une réalité. L’industrie doit montrer l’exemple et ne pas être dépendante du gouvernement".
Elon Musk, patron de Tesla, quittera le pool de conseillers de Trump : ""Le changement climatique est réel. Quitter l'Accord de Paris n’est pas bon pour l’Amérique et le monde".
La nouvelle position de la Chine, par Thibault Minot
"L’annonce du retrait des États-Unis de l’Accord de Paris sur le climat, bien qu’elle ne soit pas inattendue puisque la position du Président américain Donald Trump était sans équivoque sur le sujet, est extrêmement décevante pour la communauté internationale. Avec la Chine, les États-Unis sont responsables de près de la moitié des émissions mondiales de gaz à effet de serre, et il est donc difficilement concevable de mettre en place un accord mondial efficace sans la participation de l’une de ces deux nations.
L’annonce survenue en Septembre 2016 que la Chine participera à l’Accord de Paris sur le climat avait constitué un grand pas en avant, puisque la Chine représente à elle seule près d’un tiers des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Avec l’annonce du retrait des États-Unis de l’Accord, la Chine, qui est souvent pointée du doigt pour son modèle de développement économique peu soucieux de l’environnement, se voit présenter une opportunité pour redorer son image en faisant mieux que son grand rival économique. A en juger les déclarations dans les media proches du pouvoir chinois, dans lesquelles la décision de Donald Trump de sortir de l’Accord, a notamment été qualifiée d’« irresponsable », la Chine compte bien saisir cette opportunité.
En outre, les discussions autour du climat vont devenir de plus en plus bilatérales au lieu d’être multilatérales, offrant une chance à la Chine de se rapprocher de l’Union Européenne et de devenir le chef de file dans les négociations parmi les gros pollueurs. Le Premier Ministre chinois Li Keqiang a d’ailleurs déclaré que « dans de telles circonstances, il est important que les relations Chine-Union Européenne deviennent plus stables ». Le problème du changement climatique est un des grands enjeux internationaux du 21ème siècle, et le fait que la Chine est maintenant plus engagée que les États-Unis dans la gestion du problème aura vraisemblablement des répercutions dans les relations internationales bien au delà de la question climatique.
Du point de vue économique, le retrait des États-Unis de l’accord devrait donner un avantage comparatif aux entreprises chinoises dans les secteurs des énergies renouvelables et des technologies vertes, par rapport à leurs homologues américaines. Plusieurs sociétés américaines telles que Tesla, le producteur d’automobiles électriques, ont d’ailleurs déjà pris position contre la décision de Donald Trump. La Chine, qui a prévu d’investir 360 milliards de dollar dans les énergies renouvelables d’ici 2020, investit aujourd’hui deux fois plus que l’Union Européenne dans ces énergies et a déjà commencé à réduire ces émissions annuelles de CO2. D’après la Clean200 List, 71 des 200 plus grosses entreprises dans le secteur des technologies vertes sont chinoises, ce qui est presque deux fois plus que le nombre d’entreprises américaines (41) présente dans cette liste. La domination des sociétés chinoises à l’international ne fera que s’accentuer dans les années à venir, maintenant que les États-Unis ont adopté l’attitude défaitiste de sortir de l’Accord de Paris sur le climat".
L’annonce survenue en Septembre 2016 que la Chine participera à l’Accord de Paris sur le climat avait constitué un grand pas en avant, puisque la Chine représente à elle seule près d’un tiers des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Avec l’annonce du retrait des États-Unis de l’Accord, la Chine, qui est souvent pointée du doigt pour son modèle de développement économique peu soucieux de l’environnement, se voit présenter une opportunité pour redorer son image en faisant mieux que son grand rival économique. A en juger les déclarations dans les media proches du pouvoir chinois, dans lesquelles la décision de Donald Trump de sortir de l’Accord, a notamment été qualifiée d’« irresponsable », la Chine compte bien saisir cette opportunité.
En outre, les discussions autour du climat vont devenir de plus en plus bilatérales au lieu d’être multilatérales, offrant une chance à la Chine de se rapprocher de l’Union Européenne et de devenir le chef de file dans les négociations parmi les gros pollueurs. Le Premier Ministre chinois Li Keqiang a d’ailleurs déclaré que « dans de telles circonstances, il est important que les relations Chine-Union Européenne deviennent plus stables ». Le problème du changement climatique est un des grands enjeux internationaux du 21ème siècle, et le fait que la Chine est maintenant plus engagée que les États-Unis dans la gestion du problème aura vraisemblablement des répercutions dans les relations internationales bien au delà de la question climatique.
Du point de vue économique, le retrait des États-Unis de l’accord devrait donner un avantage comparatif aux entreprises chinoises dans les secteurs des énergies renouvelables et des technologies vertes, par rapport à leurs homologues américaines. Plusieurs sociétés américaines telles que Tesla, le producteur d’automobiles électriques, ont d’ailleurs déjà pris position contre la décision de Donald Trump. La Chine, qui a prévu d’investir 360 milliards de dollar dans les énergies renouvelables d’ici 2020, investit aujourd’hui deux fois plus que l’Union Européenne dans ces énergies et a déjà commencé à réduire ces émissions annuelles de CO2. D’après la Clean200 List, 71 des 200 plus grosses entreprises dans le secteur des technologies vertes sont chinoises, ce qui est presque deux fois plus que le nombre d’entreprises américaines (41) présente dans cette liste. La domination des sociétés chinoises à l’international ne fera que s’accentuer dans les années à venir, maintenant que les États-Unis ont adopté l’attitude défaitiste de sortir de l’Accord de Paris sur le climat".
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