Ports : la machine Afrique de Bolloré s'enraye

Les ennuis judiciaires du groupe Bolloré en Afrique s'intensifient depuis 2013, notamment sur les ports de Lomé et de Conakry, et les déboires sur les lignes ferroviaires en Afrique de l'Ouest


Par Tsirisoa Rakotondravoavy | Journal de l'Economie 


PARIS - 13/12/2018 - La holding Bolloré SA, du milliardaire français Vincent Bolloré, a été mise en examen hier à Paris par le pôle financier du tribunal de Paris. Bolloré SA est soupçonnée de "corruption" sur l'obtention de la concession des ports de Lomé et de Conakry.



Vincent Bolloré vit une tempête judiciaire depuis avril 2018. Le milliardaire français a été mis en examen à l'époque avec une garde à vue de deux jours au sujet de l'obtention de contrats de concession sur des ports en Afrique de l'Ouest. 

La justice française a mené l'enquête depuis, sur des soupçons de corruption, et a mis hier en examen la holding Bolloré SA. Cette dernière se défend dans un communiqué stipulant que "La holding Bolloré SA, qui n’est en rien concernée par les faits objets de l’investigation, a décidé d’exercer un recours afin d’être mise hors de cause". Il faut noter que le groupe Bolloré gère 16 ports dans toute l'Afrique.

Les juges d’instruction Serge Tournaire et Aude Buresi ont procédé hier à la mise en examen de la holding pour "corruption d’agent étranger", "abus de confiance" et "faux et usage de faux". Selon Maître Olivier Baratelli, l’avocat du groupe et de Vincent Bolloré : "C’est la suite logique, sans aucun élément nouveau à la procédure depuis le mois d’avril, afin que la société ait accès au dossier".

Le groupe Bolloré est soupçonné d’avoir utilisé en Afrique les activités de conseil politique de sa filiale Havas pour décrocher la concession des ports de Lomé, au Togo, et de Conakry, en Guinée, avec l'aide Bolloré Africa Logistics, ex-SDV.

SDV a en effet gagné la gestion du port de Conakry quelques mois après l’élection d’Alpha Condé fin 2010 en Guinée, et remporté la concession du port de Lomé juste avant la réélection de Faure Gnassingbé en 2010 au Togo. Ces deux président étaient conseillés par Havas, filiale de Bolloré. Les juges soupçonnent Havas d’avoir sous-facturé les services rendus aux deux présidents pour obtenir en contrepartie la gestion de ces deux ports africains, thèse appuyée par le résultat de perquisition mené dans le groupe Bolloré en 2016.

A chaque fois, la désignation de SDV a entraîné une bataille judiciaire avec les anciens gestionnaires. S’agissant de Conakry, le français Necotrans avait, dès mars 2011, déposé une plainte pour « corruption internationale », rapidement classée sans suite par le parquet de Paris.

Bolloré a déjà été condamné en 2013 à Nanterre à verser plus de 2 millions d’euros au groupe français Necotrans, qui a déposé une plainte, sans suite, pour "corruption internationale" pour l'obtention de la concession du port de Conakry. Necotrans a été placée en redressement judiciaire en 2017, avant d’être rachetée par... Bolloré.

L'ancien associé de Bolloré, Jacques Dupuydauby, évincé du port de Lomé en 2009, a également déposé une plainte contre le groupe Bolloré, et a obtenu gain de cause.

Deux autres collaborateurs proches de Bolloré sont également mis en cause dans cette affaire : le directeur général de Bolloré, Gilles Alix, mis en examen pour "corruption internationale", et Jean-Philippe Dorent, responsable du pôle international d’Havas, pour "abus de confiance" et "faux et usage de faux".

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