Vezo de Madagascar : gap sur les poulpes

PĂȘcheurs Vezo Ă  Madagascar - Photo : DR







Journal de l'Economie | Insight Desk
MORONDAVA (Madagascar), 21/07/15 (journaldeleconomie.com) -- Les pĂȘcheurs traditionnels Vezo du sud-ouest de Madagascar ont les mĂȘmes prĂ©occupations que les autres pĂȘcheurs d'autres rĂ©gions du monde : ils veulent obtenir le maximum de rentabilitĂ© sur leur activitĂ©. MathĂ©matiquement, cela signifie attraper autant de prises que possible sur chaque saison. Mais cette logique humainement comprĂ©hensible ramĂšne Ă  l'effondrement de nombreuses ressources sauvages au niveau mondial. Actuellement, selon les analystes de Blue Ventures, 87% de ces ressources de pĂȘche sont surexploitĂ©es.

Cette situation de surexploitation combinĂ©e au changement climatique mondial sont les causes locales de la dĂ©gradation de l'environnement, et provoquent l'effondrement des ressources de pĂȘche. Il faut noter que des peuples, comme les Vezo, en dĂ©pendent exclusivement. Mais les Vezo ont rĂ©ussi Ă  prouver qu'il y a une maniĂšre de faire face Ă  cet effondrement et aussi Ă  la pauvretĂ© grĂące Ă  la bonne gestion de l'environnement locale qui dĂ©pend de chaque communautĂ©. Ces pĂȘcheurs du Sud-ouest de Madagascar ont dĂ©montrĂ© lors d'une longue expĂ©rience qu'ils peuvent augmenter leur gain en laissant se reposer plus longtemps leurs prises dans la mer. En effet, en fermant environ 20% de leurs zones de pĂȘche de poulpes pendant deux ou trois mois, on peut constater que les Vezo ont pu attraper plus de poulpes et mieux rentabiliser leurs prises, malgrĂ© les fermetures saisonniĂšres de la pĂȘches en mer. 

Blue Ventures a menĂ© une expĂ©rience sur toute la zone couverte par la pĂȘche du peuple Vezo, dans le Sud-Ouest de Madagascar. Pendant une expĂ©rience de huit ans de dossiers sur cette zone, des sites de pĂȘche ont Ă©tĂ© temporairement fermĂ©s sur huit saisons. Ces pĂ©riodes de fermeture ont durĂ© Ă  chaque fois au moins 60 jours sur 20% des zones de pĂȘche de poulpes. On a pu par la suite constater que les captures de poulpes sur zones ont augmentĂ© de 718% au cours des 30 jours suivant leur rĂ©ouverture, aprĂšs les 60 jours de pĂ©riode fermeture pour chaque saison. Cela a apportĂ© une augmentation de 87% des captures pour chaque pĂȘcheur dans ces mĂȘmes zones.

Pour plusieurs villages concernĂ©s par cette mise en Ɠuvre d'une pĂ©riode de fermeture de 60 jours, leur revenu dans la pĂȘche de poulpes a plus que doublĂ© au cours des pĂ©riodes focales de 30 jours aprĂšs fermeture. Et les pĂȘcheurs n'ont constatĂ© aucune baisse significative de revenus pendant la pĂ©riode de fermeture. Ceci grĂące Ă  la marge des 80% de zones restants de leurs zones de pĂȘche qui Ă©taient toujours exploitables. La valeur des poulpes constatĂ©s dans les sites ayant connu les pĂ©riodes de fermeture a augmentĂ© de 81% Ă  chaque fin de pĂ©riode de fermeture. Ce n'est pas toutes les zones cĂŽtiĂšres occupĂ©es par les Vezo qui ont connu ces fermetures pĂ©riodiques. Des phĂ©nomĂšnes de braconnage ont Ă©tĂ© constatĂ©s dans des villages pour des raisons Ă©videntes d'Ă©conomie. Mais 75% de la rĂ©gion ont produit un bĂ©nĂ©fice lors de cette expĂ©rience. Dans l'ensemble, les pĂȘcheurs Vezo ont appris Ă  prendre soin des ressources naturelles, le principal capital de dĂ©part dans leur activitĂ©. Cette expĂ©rience a commencĂ© par une seule fermeture d'un site de pĂȘche dans un village en 2004. Le succĂšs connu par ce village a emmenĂ© plus de 250 villages longeant toute la cĂŽte sud-ouest de Madagascar Ă  adhĂ©rer Ă  cette expĂ©rience de fermetures pĂ©riodiques. 

Cette expĂ©rience a inspirĂ© les pĂȘcheurs et les villages de toute cette rĂ©gion. Les communautĂ©s Vezo y ont trouvĂ© un dĂ©but de solution Ă  la survie de leurs ressources. Ils ont commencĂ© Ă  prendre des mesures de conservation plus ambitieuses pour le long terme. Ils ont Ă©largi les fermetures pĂ©riodiques dans tous les habitats se trouvant dans les mangroves. Les villages de pĂȘcheurs se sont regroupĂ©s pour gĂ©rer les eaux cĂŽtiĂšres en formant des aires marines gĂ©rĂ©es localement. Dans ces zones, la pĂȘche non-contrĂŽlĂ©e est interdite et d'autres zones sont temporairement fermĂ©es jusqu'Ă  nouvel ordre, jusqu'au rĂ©tablissement des ressources qui se trouvaient dans ces habitats clĂ©s. Certaines de ces zones ont Ă©tĂ© dĂ©clarĂ©es aires marines protĂ©gĂ©es et sont gĂ©rĂ©es par le gouvernement central. Auparavant, les pĂȘcheurs traditionnels n'avaient pas le droit formel de contrĂŽler leurs lieux de pĂȘche ancestraux. Mais des textes ont Ă©tĂ© promulguĂ©s pour leur permettre de gĂ©rer directement les zones marines protĂ©gĂ©es. Le gouvernement leur a donnĂ© un mandat pour gĂ©rer ces ressources qui forment leurs principaux moyens de subsistance.

Environ 820 millions de personnes sur la planĂšte, soit 12% de la population mondiale, dĂ©pendent de la pĂȘche et de l'aquaculture. Pour la plupart, ce sont leurs moyens de subsistance. 87% de ces personnes travaillent dans la pĂȘche sauvage et vivent dans les pays en dĂ©veloppement. La plupart sont des pĂȘcheurs Ă  petite Ă©chelle. Il faut en outre noter que les fruits de mer sont les principales sources de protĂ©ines pour plus d'un milliard de personnes. La surexploitation des ressources naturelles et le changement environnemental mondial menacent des rĂ©cifs dans le monde entier. La gestion durable des rĂ©cifs coralliens est essentielle pour protĂ©ger Ă  la fois la biodiversitĂ© de ces rĂ©cifs et la sĂ©curitĂ© alimentaire de centaines de millions d'habitants des zones cĂŽtiĂšres. L'expĂ©rience des fermetures temporaires des zones de pĂȘche et la mise en place d'aires marines protĂ©gĂ©es gĂ©rĂ©es par les communautĂ©s locales qui ont suivi, sont une nouvelle Ă©tape vers un avenir plein d'espoir pour la pĂȘche mondiale.

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