L'économie de la biodiversité
Quantifier l'immesurable, un nouveau défi mondial
La perte de la biodiversité et des écosystèmes constitue une menace pour le fonctionnement de notre planète, de notre économie et de société humaine. L'impact des pressions accumulées sur les écosystèmes peut ne pas se faire sentir pendant des années jusqu'à ce que le point de non retour soit atteint et les réactions en chaîne entraineront les destructions définitives. Pour prendre un exemple concret, une récente étude internationale révèle que des centaines d'espèces de plantes médicinales, dont les éléments chimiques présents à l'état naturel constituent la base de plus de 50% de tous les médicaments, sont menacés d'extinction. Comme le disait Stavos Dimas, commissaire à l'environnement de la Communauté européenne, "nous sommes pour ainsi dire en train d'effacer le disque dur de la nature sans même connaitre les données qu'il contient".
Les services rendus par les écosystèmes qui sont les bienfaits que nous tirons de notre milieu naturel n'ont jamais fait l'objet de considération économique ou étaient évalués à moindre prix. Ainsi l'eau douce, les denrées alimentaires, la capacité des forêts à absorber le carbone, la régulation des climats, l'air qu'on respire, la couche d'ozone qui nous protège du soleil sont consommés par l'homme et n'ont qu'une part très réduite dans l'évaluation classique du PIB d'un pays. C'est une des causes principales de l'échec des systèmes économiques et financiers qui entrainent les pays en développement en particulier dans un cycle d'entretien de la pauvreté. Environ 60% des services rendus par les écosystèmes de la planète se sont dégradés au cours des 50 dernières années, principalement du fait des activités humaines et des facteurs tels que la croissance démographique, la conversion des cultures vivrières diversifiées en culture intensive, l'expansion économique et le changement climatique. L'économie des écosystèmes et de la biodiversité fait actuellement l'objet d'importantes études qui réunissent des économistes et des scientifiques du monde entier. L'objectif est de quantifier ces services que la nature nous apporte et d'évaluer le coût de la perte de la biodiversité et de la dégradation des écosystèmes. La tâche est extrêmement ambitieuse car il s'agit de rassembler de grandes quantités d'informations en très peu de temps vu l'urgence de la situation. Parallèlement à ce travail d'inventaire et d'évaluation, des solutions pour la réduction des pressions sur la biodiversité sont proposées par les économistes, notamment l'adoption des politiques qui récompensent la préservation de ces biens et qui attribuent une valeur marchande à la fourniture ou à l'utilisation de ces services. Ainsi, par exemple, la conservation forestière qui abrite des puits de carbone, celle de la biodiversité qui assure la pérennité de l'équilibre de l'écosystème et du cycle de la vie naturelle, mais aussi l'utilisation des énergies renouvelables et des procédés de production qui préservent l'environnement, font l'objet d'un système de compensation qui est en train de se mettre en place. Madagascar, dont les forêts ont une forte capacité d'absorption de carbone, commence à intéresser le monde consécutivement à cette nouvelle forme d'économie qui est le marché du carbone. Un projet pilote Makira Atsimon'i Masoala mené par la WCS est un des précurseurs de ce système de compensation, mais dans le reste de l'île, les travaux sont encore à l'état d'étude et sont menés principalement par les ONG internationales.
Andria Fara
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